Des tergiversations pour trouver le remplaçant de l'Étendard qui vont conduire au Super-ÉtendardA la fin des années 60, alors que l'Aviation Embarquée française est articulée autour du Vought F-8E Crusader de défense aérienne, le Dassault Étendard IVM/P d'assaut et reconnaissance et le Breguet Br.1050 Alizé de lutte ASM, l'État-major réfléchit déjà aux successeurs de ces appareils afin de maintenir l'excellence de cette arme parfaitement rodée qu'est l'Aéronautique Navale.
La Marine Nationale doit alors déterminer un plan à moyen-terme pour le remplacement de l'ensemble de ces avions. Si les successeurs possibles du Crusader et de l'Alizé ne sont pas encore désignés, celui de l'Étendard semble tout naturellement devoir être la version navale du chasseur-bombardier franco-britannique SEPECAT Jaguar : le Jaguar M. Après deux campagnes d'essais sur le Clemenceau et près de 200 heures de vol le programme est arrêté. En effet, les campagnes révèlent les limites opérationnels de l'appareil pénalisé par :
-sa sous-motorisation en cas de panne d'un réacteur lors de l'appontage ;
-la nécessité de renforcer la catapulte et le pont des porte-avions.
Devant les mauvaises performances du Jaguar, la Marine Nationale aurait eu à engager des dépenses supplémentaires dont la conséquence aurait été de ne pouvoir acheter que 75 Jaguar au lieu des 100 envisagés pour équiper trois flottilles et les deux porte-avions auraient dû être modifiés profondément. Le Service Central de l'Aéronautique navale se tourne donc vers les fabricants américains en procédant à l'évaluation du Mc Donnell Douglas A-4M Skyhawk II. Pour des raisons politiques, l'appareil n'est pas retenu, le gouvernement préférant une solution 100% française. La solution proposée par la SNIAS de construire le Ling-Temco-Vought A-7 Corsair II américain présente les mêmes inconvénients que celle du Jaguar. De plus, le prix du Corsair II est très supérieur à celui du Jaguar M. Pour remplacer les Étendard IVM, Dassault avait proposé, en 1971, un Mirage F1 Marine doté d'un réacteur SNECMA M53 (celui du Mirage 2000) qui pouvait également se substituer aux F-8E Crusader. La Marine préfère un Étendard modernisé, baptisé Super-Étendard, mais souhaite qu'il soit équipé du réacteur américain Pratt & Whitney J52 qui équipe les Douglas Skyhawk. Le 17 janvier 1973, le Ministère de la Défense demande à la société Dassault d'étudier, avec la société américaine, la possibilité de lui acheter 124 réacteurs puis y renonce.
Nécessité faisant loi, la volonté gouvernementale de ne pas faire appel à un constructeur étranger, tant en matière de cellule qu'en matière de moteur, doublée de considérations sur les limités pratiques du budget de la Marine Nationale allait déboucher sur une solution à même de satisfaire l'indépendance nationale, l'Aéronautique navale et l'industrie française : la relance de la chaîne des Étendard, avec comme but d'introduire dans une cellule déjà ancienne tous les raffinements de la technique moderne en matière d'aérodynamique, d'avionique et de moteur. Le 19 janvier 1973, Michel Debré, alors Ministre d'État chargé de la Défense Nationale, décide de faire du Super-Étendard, l'avion d'arme polyvalent de la Marine Nationale. L'étude, initiée par Bruno Revellin-Falcoz, est confiée à Emmanuel Beau alors nommé "chef d'avion". Super-Étendard 01 lors d'une campagne sur porte-avions. La version du Super-Étendard, retenue le 23 mars 1973, diffère de l'Étendard IV par les points suivants :
-Un nouveau réacteur SNECMA Atar 8K50, sans postcombustion, dérivé du 9K50 des Mirage, qui dispose d'une
poussée supérieure de 500 kg ce qui permet d'améliorer les performances de montée et les marges de manoeuvre.
-Un emport de charges extérieures accru.
-Une hypersustentation plus développée (becs basculants sur la partie repliable de l'aile et volets à double fente).
-Un système d'armes et de navigation revalorisé, défini par la Division systèmes d'armes dirigée par Daniel Lerouge. Il bénéficie de l'expérience acquise sur celui du Mirage Milan et dispose du radar Agave développé par l'Électronique Marcel Dassault, coproduit avec Thomson-CSF, d'un viseur électronique tête haute, d'un calculateur de mission ainsi que d'une central à inertie Kearfott-Sagem avec alignement à la mer.
En septembre 1973, un contrat forfaitaire est signé par l'État pour la fourniture d'une centaine de Super-Étendard à la Marine Nationale, les trente premiers de ceux-ci étant inscrits au budget 1975 des Armées. Leur livraison doit normalement intervenir en 1978.
Afin de mener à bien les essais de cet Étendard rénové qu’est le Super-Étendard et en vue de définir la version de série définitive, trois prototypes ont été financés. Pour des raisons d’économie, ces prototypes sont des Étendard IVM modifiés.
-Le premier, le Super-Étendard 01 est l’Étendard IVM n°68. Cet appareil sert pour le développement du moteur et des essais aérodynamiques.
-Le deuxième, le Super-Étendard 02 est l’Étendard IVM n°18. Il est utilisé pour les essais du Système de Navigation et d’Attaque (SNA).
-Le troisième,
le Super-Étendard 03 est l’Étendard IVM n°13. C’est un Étendard avec une voilure optimisée (nouveaux becs de bord d’attaque et volets à double fente) appelée à équiper les Super-Étendard de série. Elle permet l’amélioration de la portance aux basses vitesses. La masse à l’appontage de 7,8 tonnes maximum sur l’Étendard est passée à 8,3 tonnes sur le Super-Étendard.
De son côté, le motoriste, SNECMA, démarre l’assemblage de cinq Atar 8K50 :
-Un pour les essais au sol.
-Les quatre autres sont destinés aux trois prototypes du Super-Étendard.
Le premier vol du Super-Étendard 01 est effectué à Istres, le 28 octobre 1974, par Jacques Jesberger. Il atteint 44.000 ft d’altitude et Mach 1,18 en léger piqué avec de bonnes qualités de vol.
Le Super-Étendard 03 vole à Cazaux, le 9 mars 1975.
Le Super-Étendard 02 débute ses essais à Istres, le 28 mars 1975, piloté par Jacques Jesberger et équipé d’une pointe laser pour la télémétrie.
En juillet 1975, le Super-Étendard 01 reçoit la voilure du 03 et le système navigation armement du 02, constituant le premier Super-Étendard complet proche de la définition de série. Le même mois ont lieu, à bord du Clemenceau, les premiers essais d’appontage et de catapultages des prototypes 01 et 03. Après l’entraînement ASSP (Appontages Simulés Sur Piste) des quatre pilotes (Jacques Jesberger et Pierre Varaut pour Dassault, le CC Jean-Pierre Robillard, officier de marque et le LV Maurice Argouse pour le CEV) à partir du 23 juin 1975 sur les deux avions, le prototype 01 est convoyé à Lann-Bihoué, le 25 juin et le 03, le 27 juin.
Le premier appontage a eu lieu le 1er juillet pour les deux avions. Le premier avion à apponter est le 01, piloté par Pierre Varaut.
Pas moins de 9 campagnes d’essais sont réalisées tant à bord du Clemenceau que du Foch entre le 30 juin 1975 et le 8 juillet 1982.
Des problèmes de parasitages électromagnétiques par les radars du bord sont détectés lors des essais du Télémir, dispositif destiné au recalage du système inertiel par liaison infrarouge. Des essais ont eu lieu, à terre à Cuers, entre la troisième et la quatrième campagne porte-avions. Les trois dernières campagnes ont été essentiellement consacrées aux essais d’alignement des systèmes inertiels.
Le Super-Étendard 01 devient cellule d'instruction sur la BAN de Landivisiau puis est transféré comme "gateguard" (stèle) au Centre d’Essais Aéronautique de Toulouse (CEAT). Le second prototype (02) est envoyé comme cellule d'instruction sur la BAN de Rochefort (École des Mécaniciens) puis est transféré au Musée des Traditions de l'Aéronautique navale situé sur la même base. Le Super-Étendard 03 est quant à lui retransformé en Étendard IVM n°13.
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