Moteurs de l'Eurodrone : un choix d'Airbus qui interpelle.
Airbus a confié le développement du moteur de l'Eurodrone à General Electric, et plus précisément à quatre de ses filiales en Europe (Italie, Pologne, République tchèque et Allemagne). Créé pour symboliser la construction européenne dans l'industrie aéronautique et de défense, Airbus envoie un mauvais signal au moment où les Européens souhaitent réinvestir dans la défense et dans ses moyens capacitaires au travers des programmes européens.
Le choix d'Airbus de sélectionner GE Avio pour propulser le drone MALE (1) européen, l'Eurodrone, pose un certain nombre de questions en matière de politique d'autonomie et de souveraineté à l'industrie de défense européenne en dépit des déclarations rassurantes d'Airbus. Cette sélection interpelle au moment où l'Europe se dote d'outils comme le Fonds européen de défense (FED) pour développer une industrie européenne autonome et où elle souhaite réinvestir dans ses moyens capacitaires. Le choix d'Airbus irrite d'ailleurs beaucoup à très haut niveau en France - d'Emmanuel Macron à Florence Parly en passant par Joël Barre (Délégué général pour l'armement) -, mais aussi en Espagne, qui, contrairement à l'offre de Safran, n'obtient aucune charge de travail sur le moteur de GE Avio.
"Si au moment où les pays de l'Union européenne décident de renforcer leurs investissements, le paradoxe serait que ces investissements bénéficient principalement à des industries non européennes. Il faut donc que cet argent des Européens serve à ces industries européennes, à grandir, développer des technologies souveraines", a averti lundi à Madrid la ministre des Armées en compagnie de son homologue espagnole, la ministre de la Défense Margarita Robles. Soit une allusion à peine voilée au programme Eurodrone.
Une décision qui irrite sur le fond mais aussi sur la forme. Car Airbus avait semble-t-il promis d'attendre la fin des élections françaises pour annoncer son choix. Cela n'a pas été le cas. Le constructeur est passé en force pour tuer toute tentative de contre-attaque de la France, voire de l'Espagne, explique-t-on à La Tribune. Interrogé par La Tribune, le groupe n'a pas souhaité commenter ce point. Selon nos informations, Airbus devrait présenter le programme aux quatre pays partenaires du programme d'ici à une quinzaine de jours. Ce qui ne sera pas une demande de validation. Le patron des avions militaires chez Airbus Defence, Jean-Brice Dumont, a été très clair vendredi lors d'un briefing téléphonique à la presse : "le choix du moteur appartient à Airbus". Il semblerait que la DGA va s'y opposer malgré tout...
Airbus a notamment estimé que le Catalyst était une solution plus mature en raison de la campagne de vols d'essais qu'il effectue actuellement sur un appareil commercial (Beechcraft). A condition qu'il soit rapidement certifié. "Nous avons estimé dans la comparaison qu'il y avait un risque de développement plus faible, a expliqué vendredi le patron des avions militaires chez Airbus Defence, Jean-Brice Dumont. Clairement, Airbus a souhaité minimiser les risques. Pour autant, le moteur Ardiden 3TP s'appuie sur le moteur Ardiden 3 déjà certifié par l'EASA en 2017 pour des applications hélicoptère (plus de 100.000 heures de vol). Safran a d'ailleurs démontré les performances de l'Ardiden sur l'Eurodrone à travers une campagne d'essais d'altitude jusqu'à 45.000 pieds, selon nos informations.
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