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Jeu 29 Aoû 2019 22:01

 Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Jeu 29 Aoû 2019 22:01 
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Pilote de Funiculaire
Pilote de Funiculaire
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Inscription: Lun 26 Jan 2015 22:23
Les trois premières minutes… Docteur, suis-je folle ?

Bien, donc, nous allons détailler ces trois premières minutes. On va parler moteur, volets, vitesse de décision, changement de configuration de vol (rentrée des volets) et même, si j’ai le temps, du fonctionnement du cerveau humain… Les puristes me pardonneront, je serai forcé de faire certains raccourcis pour cet exposé, sinon, il ferait 200 pages.

L’idée qui prévaut, c’est que vous viviez votre décollage, plutôt que de le subir, tétanisé au fond de votre siège. Comme le sujet est technique, il va y avoir plein d’apartés…
Et donc, justement, on commence : vous avez tous relu la partie de mon petit exposé (première page) sur le B737 max et le réacteur ?… Non ? Allez-y vite !

De ce petit exposé, vous savez ce qu’est un pompage réacteur et sa principale cause, à savoir un trop grand apport de carburant d’un coup. La conséquence directe de ceci, c’est que l’on va devoir, lorsqu’on passe du ralenti à la pleine puissance, envoyer du carburant progressivement dans la chambre de combustion. Et plus le taux de dilution d’un réacteur est grand, plus l’inertie le sera aussi. Retenez que pour passer du ralenti (environ 25% du régime maxi) à la pleine puissance (100%, donc), huit secondes sont nécessaires. Sauf qu’en fait, il faut surtout cinq à six secondes pour passer de 20% à 50%. Ensuite, cela accélère beaucoup plus vite.

Cerise sur le gâteau, sur un même avion, lorsqu’il y a plusieurs réacteurs, ceux-ci n’accélèrent pas exactement tous à la, même vitesse, selon, par exemple, qu’ils sont « au vent » ou sous le vent »…
Prenons le cas d’un Boeing B777 aligné sur la piste, avec une composante de vent de 30 nœuds de travers, coté droit. Si vous actionnez en même temps les deux manettes de gaz de la position ralenti à la position pleine poussée, le réacteur droit, bien alimenté en air, va accélérer nettement pus vite : il atteindra 100% de son régime alors que le moteur gauche, lui, sera péniblement à 50%. Il va donc y avoir une très forte dissymétrie de poussée, et l’avion va faire demi-tour sur la piste, par virage à gauche. Ballot…

Et donc, voilà pourquoi, au décollage, nous appliquons la poussée décollage en deux temps :
- D’abord de 20 à 50% environ, pour contrôler que les deux réacteurs ont bien accéléré en même temps, puis ensuite, lorsque les régimes sont équilibrés, la poussée décollage. Lors de votre prochain vol, observez bien cette mise en poussée en deux temps…

Chouette, vous commencez à « vivre » votre décollage… On poursuit ?

Et, pendant que nous y sommes, (même si cela va servir plus tard), reprenons mon topo sur le B737 max… Vous vous souvenez, je parle partout de la température à l’entrée de la turbine. Cette fichue température, qui en fait, est la principale cause d’usure des réacteurs… Or, très souvent, les pistes sont longues, les avions pas à la masse maximale, et donc, pourquoi décoller systématiquement à pleine puissance, là, où à puissance réduite, on pourrait «économiser »é le moteur et augmenter sa durée de vie ?

Bien, un réacteur, c’est une machine un peu « <bip> »… Lui, il regarde la température extérieure, et, en fonction de celle-ci, il va déterminer la quantité maximale de carburant qu’il peut injecter pour atteindre, à l’entrée de la turbine, la température maximale.

Et donc, si par exemple la piste est longue et que l’on peut se permettre de décoller avec une puissance plus faible, pour qu’il réduise cette quantité de carburant (et donc la température turbine), on va lui mentir…. C’est le concept de la température fictive…

Un jour où il fait 20° à Roissy, on va indiquer au moteur qu’en réalité, il faut 56°C. Le moteur va donc injecter moins de carburant, la puissance sera réduite, et la longévité du réacteur améliorée. Voilà pourquoi il ne faut jamais croire un pilote : c’est un menteur ! S’il raconte n’importe quoi à son avion, il le fera sans scrupule dans la vie courante. De bien tristes sirs… On reviendra plus tard à cette histoire de poussée décollage réduite…

Tout va bien, jusqu’à présent ? Ne vous inquiétez pas, le décollage approche…

Sauf qu’avant, il faut encore que l’on parle du braquage volets…
Les volets et becs, ce sont des dispositifs hypersustentateurs. Je ferai un topo, un jour, là-dessus. Dans le principe, c’est comme si on rajoutait un bout d’aile pour augmenter la portance. Donc, on peut voler moins vite. Sauf que toute cette « tôle » que l’on sort, cela traine et donc il va falloir plus de poussée pour faire voler l’avion.

En fait, pour faire voler un avion, on dispose d’une poussée utile, fournie par les réacteurs. Et l’avion a lui une poussée nécessaire, pour qu’il puisse voler en palier. Si la poussée utile est supérieure à la poussée nécessaire, l’avion monte et/ou accélère. Dans le cas contraire, il descend ou ralentit.
Vous avez compris que plus on sort de volets, plus la poussée nécessaire augmente.

Imaginez une piste courte : vous allez vouloir décoller plus tôt, donc à plus faible vitesse. Pour cela vous allez privilégier un braquage volets plus important, pour que l’avion décolle à plus faible vitesse. Mais cela aura pour inconvénient qu’une fois le décollage effectué, à cause de l’augmentation de poussée nécessaire, l’avion, qui lui, dispose sensiblement toujours de la même poussée utile, montera avec une pente inférieure.

Le décollage approche, mais d’abord, on va parler de votre oreille interne…. Je ne vais pas en détailler son fonctionnement, mais disons qu’il y a une multitude de petits accéléromètres, qui ont leurs limites. Par exemple, si en voiture, vous accélérez très fort, puis que vous diminuez votre accélération (mais la poursuivez tout de même….), votre oreille interne va détecter un ralentissement. En voiture, vos autres sens vont prendre le relais et « détromper » cette fichue oreille interne. Mais en avion, sans références, l’impression de décélération perdurera.

Toujours votre oreille interne : si, en voiture, comme passager et les yeux fermés, vous montez une forte pente à 15% puis que la pente diminue par exemple à 5%, vous serez convaincu que vous descendez.

Et on arrive enfin au décollage. En fait, aux décollages…
Car il y a deux grands types de décollages, selon la procédure anti-bruit qui va être utilisée. Celle qui fait accélérer dès 300 mètres de hauteur, et la seconde, qui fait accélérer à 900 mètres de hauteur.
De toutes façons, jusqu’à une hauteur de 300 mètres, tout se passe de la même façon…

Image

Alignement sur ma piste et mise en poussée vers la puissance décollage. Vous savez maintenant que cette mise en poussée se fait en deux temps.
Une fois la mise en poussée effectuée (poussée réduite ou pleine poussée), ça accélère….
On passe V1 (vitesse de décision, nous en reparlerons), et arrive VR, la vitesse de rotation : le pilote tire sur le manche vers une assiette déterminée, souvent aux alentours de 15°. L’avion décolle et très rapidement, nous rentrons le train. En cabine, cela va se matérialiser par des bruis liés aux changements du flux d’air autour du train. Parfois, aussi, un bruit de pompes hydrauliques. En effet, si les pompes hydrauliques principales sont situées dans les réacteurs (et donc inaudibles), il y a aussi des pompes hydrauliques électriques qui sont elles situées dans le fuselage, au niveau de l’emplanture de l’aile. Et, lors de la rentrée du train, ces pompes viennent aider les pompes principales. Le train rentre, cela fait un « clong » quand il arrive dans son logement. Mais ce n’est pas fini, car quelques secondes plus tard, les trappes de train, qui se sont d’abord ouvertes pour laisser le train passer, vont ensuite se refermer. Deuxième « clong » et surtout, impression de silence. Le bruit des pompes électriques et du flux aérodynamique perturbé s’arrête.

Et ça continue à monter, en poussée décollage…

A 300 mètres, là on va séparer les deux types de décollage :

Cas n°1 : la fin de la montée anti-bruit à 300 mètres de hauteur : Il va y avoir trois phénomènes qui vont s’ajouter :
- D’abord, la réduction des moteurs, de la poussée décollage à la poussée montée. Et là, surtout si vous avez décollé d’une piste courte, et donc en pleine poussée, cette réduction va être sensible. Le régime moteur va passer de 100% à environ 90%. Comme en voiture lorsque l’on accélère moins fort, votre oreille interne va vous donner l’impression d’un fort ralentissement, renforcée par le fait que le brui moteur devient plus faible.
- Et, simultanément, le pilote va « rendre la main », pour prendre une pente de montée plus faible, pour accélérer. Souvenez-vous de la rupture de pente évoquée un peu avant : là aussi, l’oreille interne va vous donner l’impression de chuter. L’accélération de l’avion, très lente sera imperceptible.
- Et ce n’est pas fini : le pilote va ensuite rentrer les volets, ce qui donne parfois l’impression que l’avion « s’enfonce ».
Le cumul de ces trois fausses sensations a un effet terrible sur nos pauvres passagers stressés…

Cas n°2 : la fin de la montée anti-bruit à 900 mètres : là, c’est mieux, car tout va se décomposer…
- D’abord, la réduction des moteurs, de la poussée décollage à la poussée montée. Et là, surtout si vous avez décollé d’une piste courte, et donc en pleine poussée, cette réduction va être sensible. Le régime moteur va passer de 100% à environ 90%. Comme en voiture lorsque l’on accélère moins fort, votre oreille interne va vous donner l’impression d’un fort ralentissement, renforcée par le fait que le brui moteur devient plus faible.
- Et, simultanément, le pilote va « rendre la main », mais beaucoup moins fortement que dans le cas n°1, puisqu’il va conserver la même vitesse et également la même configuration avion, à savoir les volets.
A 900 mètres, le pilote va encore rendre un peu la main, c'est-à-dire diminuer la pente de montée, puis rentrer les volets. Mais, dans le cas n°2, les manœuvres ayant été décomposées, vous aurez des sensations très amoindries.

Retenez qu’au départ de Paris, vous serez dans le cas n°2, et, dans 90% des autres aéroports, dans le cas n°1.

La phase décollage est terminée, vous pouvez vous détendre. Mais là, cette fois, vous savez ce qui se passe. 8)

https://youtu.be/zprX6P6vKeI

On parlera dans quelques jours de la vitesse de décision (V1) et du fonctionnement du cerveau humain, face à trois situations :
- Le connu et envisagé
- Le connu inattendu
- L’inconnu inattendu

Vous remarquerez que, grâce à ce post, en ce qui concerne le décollage, vous êtes passés de "l'inconnu inattendu" au "connu envisagé"...

_________________
Il vaut mieux être par terre et souhaiter être en l'air que le contraire.
Variante: il vaut mieux un beau port de tête que le contraire.


  
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Ven 30 Aoû 2019 02:21

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 02:21 
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Principicule de Taxiway
Principicule de Taxiway

Inscription: Lun 10 Aoû 2009 17:57
Merci Korejou !
le décollage c'est pour ma part un événement qui ne me stresse pas du tout, mais j'ai vraiment apprécié tes explications, c'est toujours très interessant. !je sais maintenant pourquoi l'augmentation du régime moteur se fait aussi graduellement par exemple.

Merci pour la vidéo, c'est toujours aussi facinant ces vues de cockpit ! j'adore !

Ces histoires de décollage anti-bruit ca me rapelle un vol Los angeles>las vegas ou le pilote nous annoncait un décollage rapide pour perturber moins longtemps le voisinage ! c'était assez inhabituel et effectivement ca montait plus sec que d'habitude.....Pourtant quand je fais le LAX>CDG ca monte jamais aussi sec et pourtant le voisinage reste le même...peut etre une question d'heure....genre apres 21h les enfants dorment et faut pas les réveiller ?

Encore une fois un grand merci pour tes explications ! je suis très interessé par ton prochain topo si tu as le temps sur le fonctionnement du cerveau humain, ca ca risque de vraiment m'aider.

Tiens d'ailleurs aujourd'hui je vais apeller la psychologue du stage air france " vaincre sa peur en avion" pour mon rendez vous qui arrive bientot !


  
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Ven 30 Aoû 2019 03:41

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 03:41 
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Petit Nouveau
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Inscription: Mer 07 Nov 2018 05:00
Messages: 7
Localisation: VTPM
Merci beaucoup Korejou! Excellent didacticiel, probablement très rassurant pour les personnes angoissées.
(Ça ne rappelle la terreur de ma fille lors d'un décollage de DMK sur ATR72: en fin de première phase de montée :'il freine là, il freine??')
Je recommanderais également l'excellente série de décollages / atterrissages de Guillaume Laffon (ex-330, maintenant copi sur 777): https://www.youtube.com/channel/UCEu3oq ... jy1C0lc4ZQ
Bonne journée a tous!


  
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Ven 30 Aoû 2019 06:56

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 06:56 
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Observateur Avisé
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Inscription: Mer 27 Jan 2010 10:50
"Korejou"
Citation:
Et donc, voilà pourquoi, au décollage, nous appliquons la poussée décollage en deux temps :
- D’abord de 20 à 50% environ, pour contrôler que les deux réacteurs ont bien accéléré en même temps, puis ensuite, lorsque les régimes sont équilibrés, la poussée décollage. Lors de votre prochain vol, observez bien cette mise en poussée en deux temps…

J'avais remarqué...plutôt ressenti...cette poussée "d'équilibre" (l'avion "peine")....à la poussée "décollage" (coup de pied au cul)...lors d'un décollage à CDG...pour mon retour à "RUN" sur un 777-300ER d'Air Austral :P
En tout cas merci pour tes explications...bon vols à tous :P


  
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Ven 30 Aoû 2019 07:05

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 07:05 
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Gonfleur d'Hélice
Gonfleur d'Hélice
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Inscription: Sam 10 Sep 2011 04:53
Localisation: Entre LFMD et LFTZ
Merci Korejou pour tes exposés toujours passionnants.
Je ne fais pas partie des anxieux au décollage ou en vol, bien au contraire.
J'ai cependant des questions.
Quelle est la différence, vu (entendu) du dol entre les deux procédures ?

Qui détermine la procédure en question pour un terrain? C'est réglementaire ? Ça dépend de la densité de l'habitat, de l'heure du décollage ?.

@ froussard. A LAX je suppose que les procédures peuvent varier selon qu'on décolle vers l'ouest ou vers l'est.


  
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Ven 30 Aoû 2019 08:10

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 08:10 
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Commandant des Nuages
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Inscription: Lun 08 Juin 2009 17:35
Korejou Image a écrit:
Les trois premières minutes… Docteur, suis-je folle ?

Souvenez-vous de la rupture de pente évoquée un peu avant : là aussi, l’oreille interne va vous donner l’impression de chuter. L’accélération de l’avion, très lente sera imperceptible.
- Et ce n’est pas fini : le pilote va ensuite rentrer les volets, ce qui donne parfois l’impression que l’avion « s’enfonce ».
Le cumul de ces trois fausses sensations a un effet terrible sur nos pauvres passagers stressés…



Très instructif ce passage! En tant que PAX, après la poussée et la montée qui nous "arrache" du sol, c'est ce changement de configuration qui perturbe, ce qui est très désagréable comme sensation car on a l'impression que les réacteurs se coupent et que l'avion plane donc tombe... Surtout que suivant l'avion emprunté, cette sensation diffère entre les modèles. Sur un A320 on le ressent bien plus que sur un B777 par exemple.
Comprendre ce qu'il se passe est toujours bien plus intéressant et bien moins anxiogène.
Merci pour KOREJOU pour ces récits plus "accessibles" qui nous font mieux comprendre les différentes phases de vol à travers ceux qui les pratiquent depuis le poste!

_________________
Un voyage en avion, c'est une manière laïque de croire au ciel et de s'en remettre à lui... (B.Pivot)


  
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Ven 30 Aoû 2019 08:13

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 08:13 
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Pilote de Funiculaire
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Inscription: Sam 06 Juin 2009 17:03
Localisation: sous les pommiers pres des vaches
Merci Korejou.
Encore 2 ou 3 formations comme ça et on peut directement le faire décoller le tagazou :lol:
Plus sérieusement, les "pas trop rassurés" comme moi te remercie de tes explications limpides.
Tes petits enfants (si il y en a) doivent passer des soirées fabuleuses.
:hand:

_________________
"Avion : Moyen de transport le plus sur qui me fait le plus peur" Laurent Baffie


  
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Ven 30 Aoû 2019 10:38

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 10:38 
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Pilote de Funiculaire
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Inscription: Lun 26 Jan 2015 22:23
Marara Image a écrit:
Merci Korejou pour tes exposés toujours passionnants.
Je ne fais pas partie des anxieux au décollage ou en vol, bien au contraire.
J'ai cependant des questions.
Quelle est la différence, vu (entendu) du dol entre les deux procédures ?

Qui détermine la procédure en question pour un terrain? C'est réglementaire ? Ça dépend de la densité de l'habitat, de l'heure du décollage ?.

@ froussard. A LAX je suppose que les procédures peuvent varier selon qu'on décolle vers l'ouest ou vers 'est.


La procédure où l'on accélère dès 300 mètres de hauteur est la procédure NADP1. Elle a pour avantage la plus faible consommation de carburant, logique puisque l'on rentre de la "tôle" (les volets). Gain pour un B777: environ 200 à 300 Kg par décollage.
La procédure où l'on accélère à 900 mètres est la procédure NADP2. Elle a pour avantage de prendre de l'altitude pus rapidement, et donc épargne les riverains.

Certains terrains (dont Roissy et Orly) imposent la procédure NADP2. A noter qu'un pilote peut toujours décider d'appliquer la NADP2 si la procédure NADP1 est en vigueur. Mais bien sûr, l'inverse n'est pas vrai.
On peut aussi trouver comme avantage à la NADP2 de prendre plus rapidement de la hauteur. En cas de péril aviaire important (des piafs sur le terrain), cela peut ne pas être idiot.

Pour info: NADP = noise abatement departure procédure = procédure anti-bruit de départ.

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Ven 30 Aoû 2019 11:25

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 11:25 
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Pilote de Funiculaire
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Inscription: Lun 26 Jan 2015 22:23
tibo m Image a écrit:
Korejou Image a écrit:
Les trois premières minutes… Docteur, suis-je folle ?

Souvenez-vous de la rupture de pente évoquée un peu avant : là aussi, l’oreille interne va vous donner l’impression de chuter. L’accélération de l’avion, très lente sera imperceptible.
- Et ce n’est pas fini : le pilote va ensuite rentrer les volets, ce qui donne parfois l’impression que l’avion « s’enfonce ».
Le cumul de ces trois fausses sensations a un effet terrible sur nos pauvres passagers stressés…



Très instructif ce passage! En tant que PAX, après la poussée et la montée qui nous "arrache" du sol, c'est ce changement de configuration qui perturbe, ce qui est très désagréable comme sensation car on a l'impression que les réacteurs se coupent et que l'avion plane donc tombe... Surtout que suivant l'avion emprunté, cette sensation diffère entre les modèles. Sur un A320 on le ressent bien plus que sur un B777 par exemple.
Comprendre ce qu'il se passe est toujours bien plus intéressant et bien moins anxiogène.
Merci pour KOREJOU pour ces récits plus "accessibles" qui nous font mieux comprendre les différentes phases de vol à travers ceux qui les pratiquent depuis le poste!


Ta sensation, plus forte sur Airbus (avion basique) que sur Boeing (avion évolué) est normale. Vous noterez au passage la légère mauvaise foi, d'autant plus que j'étais sur Airbus et que je pourrais y revenir... :lol:

Et voilà l'explication. Attention, ça devient plus "pointu".

Sur Airbus, il y a un régime de montée et un seul. Donc, et en particulier si le décollage s'est fait à pleine poussée (pas d'utilisation de la température fictive), la réduction de la poussée décollage à la poussée montée va engendrer une forte de variation de régime. Et ça, vous n'aimez pas.

Sur Boeing, il y a trois poussées de montée disponibles. Par défaut, elles sont sélectionnées automatiquement en fonction de la réduction de poussée que vous avez appliqué au décollage. Par exemple, avion léger et/ou piste longue, vous avez utilisé une poussée décollage assez faible, et lors du passage en montée, l'avion va sélectionner ensuite une poussée montée faible (CLIMB 2). Ce qui implique, coté passager, à une relativement faible variation de régime moteur à 300 mètres.
Si vous décollez lourd d'une piste courte, la pleine poussée décollage sera affectée et ensuite, une poussée montée plus importante (CLIMB). Entre les deux, il existe aussi la poussée "CLIMB1"... Mais à chaque fois, la variation de poussée sera assez faible sur Boeing. Tout dans la nuance...
A noter que l'écart entre les trois régimes de montée va s'amenuiser doucement en prenant de l'altitude.

Toujours sur Boeing, on peut aussi faire un décollage "intelligent" (mot inconnu chez Airbus). Par exemple, faire un décollage avec une poussée très réduite, parce que la piste est longue, puis, ensuite, sélectionner une poussée montée importante (CLIMB) pour monter plus rapidement. C'est par exemple le cas sur certaines pistes et départs à Tokyo Haneda. Pour le passager, l'effet pourra être surprenant, puisqu'à 300 mètres, le régime moteur, au lieu de diminuer, va augmenter. L'intérêt de décoller à poussée réduite (alors que dans ce cas, il semblerait logique de décoller dès le départ "plein pot") vient du fait que, si on se paie un oiseau dans le réacteur au décollage (il y en a à Tokyo), cela fera beaucoup moins de dégât au réacteur si il est à poussée réduite plutôt qu'à régime maxi.

Là, on rentre vraiment dans les détails, mais, si un jour, vous ressentirez une accélération des moteurs au cours de la montée après décollage, vous saurez que vous volez sur un bel avion... 8)

J'essaie de vous faire ce soir une photo de l'écran où l'on voit ces différents types de montée.

Je rentre, dormez pour moi, prochaine intervention la semaine prochaine. :P

Il y a deux jours, photo prise du bureau... Ou lorsque la Terre s'éveille. Je ne m'en lasserai jamais.

Image

Au passage, vous noterez une légère différence selon les constructeurs. A Seattle (Boeing), on considère que le pilote est doté d'une certaine forme d'intelligence. Et à Toulouse, non.

Je dis ça, moi, je ne dis rien. Et malgré tout, il parait que l'A350 est, une merveille.

Une dernière pour sourire et à prendre au moins au troisième degré.... Dans les années 90, on avait pour coutume de dire:

"Les Boeings sont faits par des <bip> pour être pilotés par des dieux. Chez Airbus, c'est le contraire."

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Ven 30 Aoû 2019 12:01

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 12:01 
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Gonfleur d'Hélice
Gonfleur d'Hélice

Inscription: Mar 17 Jan 2012 13:17
Superbes explications Korejou, comme toujours, merci! 8)

Magnifique photo, c'est chouette que depuis le temps tu ne t'en lasses toujours pas.........

Quant à la prise en compte de l'intelligence des pilotes chez Boeing, il semblerait que sur la dernière version du B737, ils l'aient un peu laissée de côté quand même........... :roll:

J'espère avoir un jour l'opportunité de t'avoir comme "chauffeur", ce serait vraiment sympa et ô combien plus instructif que de passer la nuit à essayer de passer le temps devant un IFE si performant soit-il! :mrgreen:


  
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Ven 30 Aoû 2019 12:03

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 12:03 
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Principicule de Taxiway
Principicule de Taxiway

Inscription: Sam 23 Mar 2019 10:22
Beau bureau. :P Et merci pour ces explications. Je suis un flippé du décollage et pourtant tout le b... autour des becs, des volets et des divers bruits liés au circuit hydraulique, je sais ce qu'il y a derrière. Mais au niveau du régime moteur et des sensations de mon oreille interne, je viens d'apprendre des choses intéressantes. Je penserai à Korejou
lors de mon prochain vol qui se fera probablement... avec un ventilateur (un ATR). :lol:


  
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Ven 30 Aoû 2019 12:20

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 12:20 
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Gonfleur d'Hélice
Gonfleur d'Hélice

Inscription: Mar 17 Jan 2012 13:17
C'est chouette l'ATR, on est pas embêté par les ailes pour voir en bas! J'évite juste de me mettre pile au niveau des hélices, on ne sait jamais................. :mrgreen:

Nous avons fait un Réunion-Mada en ATR absolument génial avec 12 passagers seulement dans l'avion, chacun aurait pu se prendre une rangée à lui tout seul! :lol:


  
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Ven 30 Aoû 2019 13:51

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 13:51 
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Inscription: Jeu 02 Mai 2019 13:08
Merci Korejou pour ce super tuto/explication décollage, c'est hyper intéressant et c'est là que je me dis que franchement c'est pas donné a n'importe qui de décoller/atterrir bref piloter !

Ton exemple de la piste courte est hyper intéressante ! J'ai toujours eu tendance à comparer là piste de décollage à une voie d'insertion et pour moi plus la voie est courte plus il faut accélèrer rapidement et donc pousser plus les rapports ! Et donc si je comprend bien finalement en avion c'est l'inverse ? (je suis désolée c'est le moment ou je suis perdue et j'ai pas assez revisé tes cours ! :oops: )

Je vais potasser l'oreille interne ça je me doutais qu'elle faisait des sienne en vol mais je m'étais jamais posé la question de comprendre le pourquoi du comment de cette sensation de ralentir ou de descente.

Moi le Clong des trains j'aime bien, je me dis peut être à tord que si vous les rentrez c'est que tout va bien !

Merci encore


  
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Ven 30 Aoû 2019 14:19

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 14:19 
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Observateur Avisé
Observateur Avisé

Inscription: Lun 18 Jan 2016 14:03
Localisation: Montréal/Saint Raphael
Superbes explications, merci Koréjou.
Je ne suis pas un flippé mais c'est vrai que parfois on ressent des sensations disons désagréables, maintenant je saurai pourquoi.
Et pour mon voyage à YUL, est ce que tu seras devant ? (AF 348 du 17 septembre)

_________________
S'il n'y a pas de solution c'est qu'il n'y a pas de problème.


  
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Ven 30 Aoû 2019 14:38

 Re: Les trois premières minutes démystifiées... "Allo, docteur?"
MessagePosté: Ven 30 Aoû 2019 14:38 
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Pilote de Funiculaire
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Inscription: Lun 26 Jan 2015 22:23
ours des Canadiens Image a écrit:
Superbes explications, merci Koréjou.
Je ne suis pas un flippé mais c'est vrai que parfois on ressent des sensations disons désagréables, maintenant je saurai pourquoi.
Et pour mon voyage à YUL, est ce que tu seras devant ? (AF 348 du 17 septembre)


Je dois filer. Mais à ta question, la réponse est non. Il s'en est fallut de peu. 8)

_________________
Il vaut mieux être par terre et souhaiter être en l'air que le contraire.
Variante: il vaut mieux un beau port de tête que le contraire.


  
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