L’ A310 part de Khartoum vers 8h30 du matin pour un vol vers Amman via Damas . Un tolérance technique sur la reverse du moteur gauche est acceptée par le CPT. Elle est désactivée ce qui signifie que la manette de reverse peut-être tirée mais mécaniquement, rien ne se passera, le moteur restera au ralenti de la poussée positive.
En termes de performances règlementaires, les reverses ne sont pas prises en compte pour les perfo atterrissage sur piste sèche, seuls les freins et spoilers sont pris en compte. Mais sur piste mouillée et contaminée, il faut les prendre en compte et une reverse en moins impose un abattement de masse si nécessaire. Le rapport ne parle pas de cet abattement, leur masse était faible 120 tonnes.
Sur le vol retour, vers Khartoum, le mauvais temps local impose un dégagement sur Port Soudan , où un complément de plein à 20 t est fait pendant l’escale de 1h15. La météo de Khartoum s’améliorant, le retour est décidé.
L’ILS 36 est en panne, une VOR/DME 36 est entreprise pour la piste 36 longue de 2980 m. Il fait nuit, il pleut, la piste est mouillée et il est 17h30 locales (déjà 9h30 de travail depuis le départ) L’ ATC donne un vent du 320/7 kts , l’ atterrissage est un peu long , touché à 900 du début de bande , 300 m après la zone nominale de 300/600m.
Les manettes reverses sont tirées, la gauche ne passe pas, sans surprise, mais le CPT aux commandes, a du mal à tenir l’ axe, remet les manettes reverses sur ralenti, utilise le freinage différentiel au pied pour revenir sur l’ axe. Puis voyant le bout de piste arriver,et surpris de ne pas sentir l’ avion freiner, passe le sélecteur de freins/antiskid sur ATN / OFF , ce qui veut dire que c’est autre circuit hydraulique qui freine et surtout pas d’ antiskid ; le CPT freine l’avion et repasse les reverses . Evidemment, les roues bloquent sur la piste de mauvaise qualité et très mouillée …
L’avion sort de piste à 76 kts et s’arrête 215 m après le bout de piste, avion en flamme côté droit, seuls les toboggans gauches sont utilisés. 29 occupants sont tués. De grosses difficultés avec les pompiers, en nombre insuffisant (détachés ailleurs et pas payés.) Avion détruit.
AAICD
Causes et facteurs contributifs :
- contrairement aux consignes Cie et à la suggestion du FO , le CPT décide de ne pas utiliser l’ autobrake (flèche bleue de la photo).
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- le vent donné par la tour n’est pas celui qu’ils rencontrent à l’atterrissage ; leur vitesse indiquée est de 140 kts mais touchent les roues à une vitesse sol de 155 kts, soit 15 kts de vent arrière. Ce qui explique le toucher tardif. Ils n’ont pas perçu le vent arrière sur leurs instruments.
- pas de freinage manuel (aux pieds ..) difficulté passagère de tenue d’axe.
- 800 m avant le bout de piste, à 109 kts, le sélecteur de freinage/ antiskid est passé sur ATN /OFF, les roues bloquent au freinage, elles sont en plein dans la plage de vitesse d’hydroplanage. Sélecteur =flèche rouge de la planche au dessus.
- les reverses sont de nouveau passées à 300 m du bout de piste à 93 kts , sauf que les reverses c’est un moyen de décélération, pas de freinage .
- un spoiler n’est pas sorti, mais son manque d’effet n’aurait changé que de qq nœuds la vitesse de sortie de piste.
J’ai regroupé sur une même vue 2 planches du rapport : courbes de décélération reportées par rapport au toucher des roues, la courbe en « électrocardiogramme » représente la décélération mesurée aux enregistreurs, la courbe en traits plein noir, la simulation de décélération sans freinage .
AAICD
On voit bien les séquences : reverses et pas de freinage, retour reverse, freinage au pied sans antiskid , de nouveau reverses .Sur les 900 m restants , un avion sans freinage ne pouvait que sortir de piste ( cadre orange)
Sur cette planche idem:
AAICD
Sur cette planche, faible coefficient de freinage de la piste, en bleu la variation de vitesse si les reverses avaient été utilisées tout le long, et en noir la variation réelle .
En bleu, ils seraient quand même sortis de piste mais moins vite qu’en réel. Le passage sans antiskid étant un gros facteur.
AAICD