Boycotter l'avion, un mauvais combat
La honte de prendre l’avion nie le progrès technique et la bonne volonté du secteur aérien en matière environnementale
La honte de prendre l’avion est la dernière illustration de l’écologie rétrograde prônée par les décroissants. Illustration notable, la jeune militante suédoise Greta Thunberg ne trouvant guère de voilier pour sa traversée retour de l’Atlantique, demeure bloquée aux États-Unis.
L’avion reste pour autant un moyen de transport en commun, responsable seulement de 2 % à 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Le combattre, par la taxe ou le boycott, peut s’avérer particulièrement contre-productif.
Casse de l'investissement
Les compagnies aériennes sont les meilleurs alliés du développement durable. Dans ce marché très concurrentiel, les voyageurs font face à une abondance de choix. Les compagnies de même que les constructeurs sont ainsi forcés d’innover constamment pour satisfaire les passagers, qui ont le dernier mot et une conscience écologique développée.
De l’autre côté, le raisonnement est pervers. Vider les avions avec l’écotaxe instaurée en France ou le «flygskam» grandissant en Suède prive les transporteurs de recettes. C’est en effet le meilleur moyen pour ralentir les investissements.
Avec une baisse de la fréquentation aérienne, comment continuer à investir dans des technologies de rupture qui viennent par exemple pousser hors du marché les gourmands en kérosène A380 pour déployer les A350 plus économes et modernes ? Nul doute ne fait que si le consommateur abandonne, les compagnies laisseront tomber elles aussi !
Des compagnies de plus en plus engagées
Si certains sont tentés de faire passer le secteur aérien comme le nouvel ennemi public, il n’a pas attendu le «flygskam» pour s’engager dans le développement durable. Les constructeurs comme les transporteurs déploient de plus en plus de moyens en ce sens. United Airlines vient d'annoncer avoir investi 40 millions de dollars dans le développement des biocarburants quand Air France par exemple, en plus de doter sa flotte d’avions plus verts (A350 et A220), opère une reforestation massive qui vise à compenser ses émissions sur les vols domestiques.
Aussi, , le Syndicat national des pilotes de ligne justifiait de sa bonne volonté écologique notamment par des choix optimisés de trajectoires de vols et des volumes de carburant embarqué.
Des moyens alternatifs pas si vertueux…
C’est un défi auquel fait face Greta Thunberg pour rentrer en Europe assister à la COP25. Refusant de prendre l’avion alors que les voiliers se font rares sur l’Atlantique en cette saison, les seuls paquebots restants polluent plus que l’avion sur les chemins transatlantiques.
Sinon, certes plus essentielles que l’avion, les voitures restent le moyen de transport qui émet le plus de CO2. D’ailleurs, les nouveaux avions (à condition qu'ils soient pleins) ne pollueraient pas plus qu'un véhicule automobile hybride aux 100 km/passager. Preuve que l’innovation est la clef de la transition écologique. Si la honte de prendre l’avion est méritante dans les esprits suédois, c’est en France le courage de prendre le train qui devrait être récompensé.
Léo Dumas est étudiant en commerce à Montréal.
https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-boycotter-lavion-un-mauvais-combat-1147097