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Ce qu'il s'est vraiment passé lors de l'amarrage du module Nauka à la Station spatiale
Dans une interview accordée au The New York Times, Zebulon Scoville, le directeur de vol, en charge du centre de contrôle de Houston au moment de l'amarrage de Nauka, explique que l'incident avec les propulseurs du module Nauka a été plus grave que ce que laissaient entendre les premiers communiqués.
L'incident, qui a affecté la Station spatiale internationale, s'est finalement avéré bien plus impressionnant que ne le laissaient penser les premiers communiqués de la Nasa et de Roscosmos qui se voulaient rassurants. À la suite de l'allumage surprise des propulseurs du module russe Nauka qui s'est produit après s'être amarré à l'ISS, la station a basculé de 45 degrés twittait la Nasa. En réalité, la situation de l'ISS était bien plus « acrobatique », dirons-nous !
Dans une interview accordée au journal The New York Times, Zebulon Scoville, le directeur de vol qui était en charge du Centre de contrôle de mission de la Nasa, à Houston, lors de l'incident, a décrit comment la Station spatiale avait effectué « un tour et demi -- environ 540 degrés -- avant de s'arrêter à l'envers, puis d'effectuer un retournement de 180 degrés vers l'avant pour revenir à son orientation d'origine. C'était la première fois que nous faisions face à une urgence de cette nature ! » Dommage qu'aucune caméra n'ait observé la scène : on aurait assisté à une incroyable chorégraphie acrobatique !
Une situation inédite
L'incident aurait été « mal rapporté » dans les premières minutes qui ont suivi, explique Zebulon Scoville avant que le Centre de contrôle de la Nasa ne reçoive des « alertes qui indiquaient que la station spatiale avait perdu le contrôle d'attitude », c'est-à -dire que la Station avait commencé à basculer. Habituellement, « quatre gros gyroscopes tournant à 6.000 tours par minute maintiennent la station en position stable, mais une certaine force semblait contrebalancer leurs efforts » pour que la Station garde la bonne attitude.
Bataille de propulseurs dans l'espace
En cause, les propulseurs de Nauka qui se sont allumés subitement alors que le module russe était amarré à la Station ! Pire, il n'y avait aucun moyen de les désactiver. En effet, Nauka est configuré pour recevoir des commandes directes seulement lorsque l'ISS est en visibilité d'une station russe. Or la station suivante était à 70 minutes de vol. Bien que les contrôleurs russes n'aient pu reprendre le contrôle de Nauka, ils ont pu « activer des propulseurs d'autres modules du segment russe » pour contrer ceux de Nauka. Les propulseurs du module Zvezda ont donc été allumés « mais cela [n'a] pas [été] suffisant pour arrêter la rotation de l'ISS ». Il a donc été décidé d'allumer « également les propulseurs d'un cargo Progress amarré à l'ISS ».
Finalement, les propulseurs de Nauka se sont « éteints au bout de 15 minutes sans que l'on sache pourquoi. Peut-être que les réservoirs de carburants ont été vidés par le fonctionnement des moteurs ? » La Station est ensuite revenue à sa position initiale. « Après avoir fait un saut en arrière une fois et demie, la station a marqué un temps d'arrêt, puis est revenu dans l'autre sens ». Les sept astronautes à bord « n'ont jamais été en danger et la situation ne s'est pas aggravée », tient à préciser Zebulon Scoville.
Le taux de rotation de l'ISS a atteint un maximum de 0,56 degré par seconde, ce « qui n'était pas suffisant pour générer une gravité artificielle significative », souligne Zebulon Scoville. À bord, l'équipage n'a ressenti aucun changement notable dans les conditions environnementales à l'intérieur de la station. Au sol, les rotations de l'ISS n'ont pas été sans conséquences. Si la structure du complexe orbital ne semble pas avoir subi de dégâts, Les communications avec l'ISS ont été interrompues à deux reprises, pendant 4 et 7 minutes. Les principales mesures ont consisté à s'assurer du bon fonctionnement des panneaux solaires et de la bonne orientation dans l'espace des panneaux dissipateurs de chaleur.
Côté russe, Roscosmos a simplement déclaré qu'un problème logiciel sur Nauka avait eu pour conséquence de déclencher la commande d'allumer les moteurs du module et aucune explication n'a été donnée concernant l'arrêt des moteurs.
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